Les expériences de la marginalisation sont propres et uniques à chaque groupe marginalisé ainsi qu’aux individus de chacun de ces groupes. Les messages négatifs au sujet d’un groupe marginalisé ou l’absence de messages en raison de l’invisibilité sociale de ce groupe peuvent créer des sentiments de honte ou de haine de soi et mener au déni ou au rejet de son identité. En présentant les grandes lignes, nous tentons de nommer, de reconnaître et de montrer les diverses catégories de problèmes que nos élèves amènent à l’école tous les jours et que nous observons dans nos écoles de langue française et dans nos salles de classe.
Tout d’abord, il est clair que le manque de ressources et de services en français est un exemple d’une expérience de marginalisation à laquelle bon nombre d’entre nous pouvons nous identifier, en tant que francophones vivant en contexte minoritaire. Nos élèves manquent parfois de référents culturels ainsi que du contenu francophone sur Internet, un lieu d’apprentissage, d’échange et de socialisation de plus en plus important dans leur vie. Cela pose des défis aux écoles de langue française dans l’avancement du projet culturel francophone :
En effet, l’accès et l’échange faciles de contenus culturels via Internet servent dans une large mesure la construction des références culturelles des jeunes et la prédominance de la culture américaine et de l’anglais sur Internet comme partout ailleurs place les jeunes qui évoluent en milieu minoritaire dans une situation de grande vulnérabilité culturelle.
– Approche culturelle de l’enseignement pour l’appropriation de la culture dans les écoles de langue française de l’Ontario, 2009, p. 13
Par ailleurs, la pauvreté est un indicateur courant du statut social marginalisé d’un grand nombre d’élèves et de familles qui subissent de l’iniquité et de l’exclusion sociale. En effet, la pauvreté entraîne de nombreux tracas quotidiens et peut aller jusqu’à ne pas pouvoir répondre aux besoins fondamentaux d’un.e jeune, comme vivre des épisodes d’itinérance ou dans un logement précaire, ou devoir commencer la journée sans nourriture ni vêtements adéquats.
La pauvreté n’est pas un trouble d’apprentissage, mais lorsqu’on ne tient pas compte des besoins des enfants pauvres, la pauvreté peut être invalidante.
Les parents, tutrices et tuteurs peuvent avoir des soucis financiers et n’avoir que très peu d’énergie à consacrer à l’éducation de leurs enfants.
Pour une discussion plus exhaustive sur les obstacles à l’engagement des parents, tutrices et tuteurs marginalisés, nous vous invitons à consulter notre module de formation professionnelle intitulé Parents, tutrices et tuteurs : Partenaires pour la prévention.
Des formes d’exclusion plus complexes peuvent également résulter de la pauvreté, comme le manque d’accès à la technologie pourtant essentielle au fonctionnement de l’élève comme être social dans la culture d’aujourd’hui. La pauvreté peut restreindre les horizons des jeunes, limiter leur exposition et leur accès au monde en général et à leurs propres possibilités. Cela peut en retour miner leur confiance en soi et leur foi en un avenir positif.
La pauvreté n’est toutefois pas le seul obstacle auquel font face les élèves marginalisés. Les élèves qui ont des besoins spéciaux se sentent souvent exclus de toute une série d’activités éducatives dans la salle de classe et l’école. Par exemple, l’inaccessibilité peut être le résultat d’une barrière physique, de l’aménagement d’un lieu interdisant l’accès à une activité éducative ou du manque de services spécialisés.
Les jeunes de groupes sociaux marginalisés peuvent être plus vulnérables à la violence sous toutes ses formes. Les normes liées au genre nuisent encore davantage aux jeunes, créant des attentes non réalistes et préjudiciables ou les forçant à adopter des rôles ou des identités qu’elles et ils ne choisissent pas librement. Ces difficultés sont exacerbées quand les jeunes subissent de la cruauté et de l’injustice comme l’intimidation et la discrimination. Ce sont souvent les nouvelles arrivantes et les nouveaux arrivants, les jeunes autochtones ou LGBTQ ou les élèves qui ont des besoins spéciaux ainsi que bien d’autres groupes marginalisés qui en sont la cible.
En tenant compte de ce contexte, il est facile de comprendre qu’un certain nombre d’élèves arrivent à l’école sans l’énergie et l’étincelle nécessaires pour participer à leur apprentissage et à la vie scolaire.
L’élève qui sait que les autres sont sensibles à ce qu’elle ou il ressent arrive à mieux se concentrer en classe malgré ses difficultés. Au début de chaque classe ou de la journée, pourquoi ne pas demander à nos élèves comment elles et ils se sentent. On peut tout simplement leur proposer de placer sur leur bureau une carte ou un symbole qui représente leur état émotif ou leur niveau d’énergie. (Par exemple, vert = beaucoup d’énergie; jaune = peu d’énergie; rouge = très peu d’énergie, ne souhaite pas vraiment interagir avec les autres.) Pour les groupes d’élèves plus jeunes, ou les classes plus petites, on peut faire le tour de la salle et demander à chaque élève d’expliquer son état d’âme en quelques mots.